La demoiselle de Planey.(2)
La demoiselle de planey. (2)
On murmura que la sorcière pourrait bien avoir dévoré ces braves garçons sans malice.
N'avait-elle pas des pouvoirs?
Elle parlait aux bêtes sauvages et les loups étaient ses amis.
N'était-elle point, ceux-là, des êtres venus tout droit de chez Satan?
La rumeur enfla et s'infecta.
La haine envahit les villages.
On accusa la demoiselle de porter malheur au pays.
Un vieux mourrait-il? C'était elle qui l'avait offert à l'enfer.
Des enfants qu'elle avait guéri la pourchassèrent à coups de pierres.
On la captura dans le bois.
On la mena, les poings liés, en foule hérissée de bâtons, à Luxeuil, chez l'inquisiteur.
On l'interrogea.
Elle n'avait rien fait que de bien.
Certes, elle parlait aux animaux, savait l'art des remèdes simples.
Etait-ce un mal, Dieu qui sait tout?
On lui fit subir la torture, puis la fée trop simplement femme fut jetée au fond d'un cachot.
Elle fut jugée le lendemain.
Son crime était sur son visage. Elle était belle et désirable, on se perdait dans son regard.
On l'estima bonne à brûler.
Un bûcher fut bientôt dressé. Elle mourut droite dans les flammes, sans rien comprendre à son malheur.
On dit qu'au soir sur les décombres cinq moines s'en vinrent prier et pleurer leurs amours en cendres.
On reconnut les disparus que l'on avait crus dévorés par l'innocente aux yeux verts.
On dit que lorsqu'ils s'en allèrent la brume enveloppa la ville et le ciel pleura, lui aussi.
Henri Gougaud
La Bible du Hérisson