La demoiselle de Planey.(1)

Publié le par Maya

 

 

La demoiselle de Planey. (1)


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La demoiselle de Planey vivait seule dans la forêt. Ses yeux étaient verts profonds et verts traversés de lueurs dorées.

Elle s'enfuyait comme un oiseau dès qu'on tendait la main vers elle. Ses jambes étaient nerveuses et fines.

Les bêtes des fourrés, les arbres, les clairières l'aimaient comme une soeur.

 

Parfois des bûcherons la voyaient traverser les rayons de soleil qui tombaient des feuillages, un corbeau sur l'épaule, un loup flairant ses pas.

Les hommes du pays l'aimaient en secret.

Certains l'aimaient sans rien dire.

Elle ne permettait pas qu'on lui parle d'amour.
"Je n'ai pas le temps!" disait-elle.

Elle tournait le dos et s'enfonçait dans les broussailles.

 

Jour et nuit elle courait le bois. Elle y cherchait des herbes rares.
Elle descendait parfois à Bouligney, à Cuve ou dans d'autres villages. Elle s'approchait d'une maison où était un enfant fiévreux, posait ses plantes guérisseuses sur le rebord de la fenêtre, cognait vivement au carreau et s'en allait, furtive.

Quand on ouvrait la porte, on n'apercevait d'elle qu'un envol de jupon, au coin du mur.

 

Or, un hiver, cinq jeunes hommes disparurent du bourg d'Anjeux. C'étaient des gaillards au coeur large. Tous les cinq avaient avoué à leurs compagnons, une nuit d'ivresse bavarde, qu'ils aimaient la fée de Planey.
On se souvint de leurs paroles.

On les répéta.

On se dit :

"Peut-être malgré l'apparence cette fille sans feu ni lieu est-elle un Esprit maléfique, un de ces fantômes vivants qui ensorcellent les naïfs et les entraîne à travers les brumes Dieu sait où, dans quel au-delà."

 

Les mots noirs, de bouche à oreille, les peurs confuses, les soupçons peu à peu rongèrent les âmes.

 

Henri Gougaud

La Bible du Hibou

(La suite dans 2 jours)

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